Il faudra attendre le XVIIe siècle, alors que certains procès défraient encore la chronique, pour que des voix s’élèvent et proposent des explications nouvelles de la sorcellerie. Parmi ces voix, des membres du clergé et des médecins qui posent sans en avoir toujours conscience le problème de la femme dans la société chrétienne. Du point de vue théologique, la femme est marquée par le péché originel et reste l’agent du Diable. Mais l’on voit grâce à ces témoignages que c’est aussi son corps qui inquiète : la méconnaissance de sa physiologie laisse libre cours à toutes les extravagances de l’imagination.
A la fin de cet ouvrage dont l’iconographie est très réussie - y figurent des peintures de Baldung ou de Bosch mais aussi des gravures et des enluminures saisissantes - se trouvent des documents extrêmement stimulants et prompts à approfondir notre réflexion sur le sujet. Ils concernent tant la vision romantique de la sorcellerie (on y trouve des textes de Michelet aujourd’hui désuets - la sorcière est une femme révoltée contre la société qui l’opprimait, idée que plus aucun historien ne peut plus faire sienne - mais dont la force littéraire demeure intacte), des textes sur l’affaire de Loudun, sur les sorcières contemporaines, sur la sorcellerie dans d’autres cultures.
Mais aussi des recettes traditionnelles destinées à se prémunir, comme celle qui doit empêcher les différends et les divorces : " Pour empêcher le différend et le divorce entre un homme et une femme, il faut prendre deux cœurs de caille, un de mâle et l’autre de femelle, et faire porter celui du mâle à l’homme et celui de la femelle à la femme. Tandis qu’ils le porteront, bien loin avant d’avoir des différends entre eux, ils s’aimeront si tendrement que personne ne pourra les faire haïr l’un de l’autre, pas même avec des enchantements ou des sortilèges ".
Convaincus ?
Jean-Michel Sallmann, Les sorcières, fiancées de Satan, Gallimard Découvertes, 1989, 192 p.